Budget primitif 2025 : l’impossible équilibre budgétaire sans l’aide de l’Etat



Ce matin, l’Assemblée de Province a voté le 6e budget de la mandature fortement dégradé par la chute des recettes fiscales (-16,35 Mds CFP), conséquence des exactions et de l’insécurité persistante en Nouvelle-Calédonie. Dans ce chaos, la Province ne compte pas lâcher ses investissements pour la relance, l’éducation et la santé, et « fait le choix de croire en l’action urgente de l’Etat », a soutenu la présidente, Sonia Backès : « Parce qu’on est une collectivité de la République, et nous vivons des choses inacceptables nulle part ailleurs, sur le territoire de la République. »

En recul de 10 % par rapport à 2024, le budget 2025 s’élève à 51,1 milliards de francs, dont 12 milliards alloués en investissement et 39,1 milliards en fonctionnement.


« L’Etat s’est engagé à nous aider… malgré la chute du gouvernement Barnier c’est sur cet engagement que repose ce Budget primitif », a déclaré Sonia Backès. Nul autre choix pour la collectivité, que de voter ce jour, un budget qui inscrit l’aide vitale de l’Etat pour couvrir une partie des 16.3 milliards de pertes fiscales et éviter l’effondrement du système. Faute de cette aide, des dispositifs majeurs risquent de s’arrêter dès janvier 2025, comme rappelé par la présidente : « fermeture des dispensaires, des parcs provinciaux, suppressions des bourses, des contractuels, des programmes d’insertions, baisse de l’investissement de plus de moitié…pour l’instant nous faisons le choix de croire en des solutions en concertation avec l’Etat et la Nouvelle-Calédonie. »

Face à la chute réelle des recettes fiscales attendues et à l’arrêt du chômage partiel au 31 décembre, impactant 20 000 Calédoniens et tout un système social, Philippe Michel a souligné l’ampleur de la catastrophe qui guette « toutes les collectivités du pays » : « Le pire n’étant jamais certain, la situation peut encore s’aggraver puisque les recettes qui seront effectivement collectées peuvent être nettement moindre que cela. » Deux scénarios se profilent : annoncer l’effondrement du système ou intégrer l’aide financière de l’Etat. L’exécutif a opté pour le deuxième afin de maintenir le système et croire en l’Etat, sans qui, « aucune collectivité n’aura le moindre avenir » a déclaré Philippe Michel.

L’urgence d’une réponse de l’Etat

La présidente, Sonia Backès, n’a pas manqué d’interpeller l’Etat pour lancer une énième alerte, évoquant la situation insoutenable d’enfants boursiers : « Beaucoup d’entre eux viennent à l’école pour pouvoir manger à midi. Si nous arrêtons les bourses, certains ne pourront plus se nourrir. Je suis étonnée de voir que sur le territoire de la République, on laisse une collectivité dans la situation qui est la nôtre aujourd’hui. Au mois de décembre, nous n’avons pas payé les bourses des étudiants en Métropole…parce que nous n’avons plus rien dans les caisses ! Avant le 13 mai, nous avions retrouvé une situation financière saine, et aujourd’hui, on vit des choses dont jamais j’aurais pensé que l’Etat puisse laisser faire. »

Dans cette même perspective, l’élue Marie-Jo Barbier a tenu à rappeler la « gestion rigoureuse, responsable et courageuse des finances de la collectivité, pour assainir et redresser les comptes en l’espace de 4 ans ». « Cette gestion, a-t-elle ajouté, a permis d’investir dans l’économie Calédonienne tout en bénéficiant d’une trésorerie solide en cas de crise. C’est cette même trésorerie qui a permis de préserver la province Sud au lendemain du 13 mai. Les coupes budgétaires aussi drastiques qu’inédites, ne sont pas des choix délibérés de notre collectivité, mais une nécessité imposée par la gravité de la situation. »

Malgré l’instabilité politique, la volonté de trouver le chemin de l’unité

Lors des discussions, Virginie Ruffenach a salué la volonté de l’exécutif de croire en l’intervention de l’Etat, rappelant toutefois que : « les bonnes intentions ne suffisent pas, parce que l’enfer est pavé de bonne intentions. En l’absence de gouvernement, nous devons trouver les chemins et être unis pour solliciter une avance de trésorerie et chercher les bons leviers car nous ne pouvons attendre février ou mars 2025. » La présidente Sonia Backès est revenue sur le vote de la DM6, hier soir au Congrès, qui prévoit une aide exceptionnelle de l’État à hauteur de 27,6 milliards de francs pour compenser les pertes fiscales : « Ce vote nous permet en effet de tenir jusqu’au mois de février. Mais après février, nous n’avons aucune perspective. » 

Au cours des échanges, Nina Julié a dénoncé « le traitement indécent » réservé aux Calédoniens par l’Etat, relevant les problèmes d’insécurité qui persistent dans certains quartiers, et les absences d’aides concrètes. Malgré ces manquements dénoncés par la majorité des élus, Sonia Backès a souhaité rappelé la responsabilité des uns et des autres : « la responsabilité du 13 mai, elle n’est pas celle de l’Etat. Ces actions violentes et organisées sont de la responsabilité des organisateurs. Aujourd’hui c’est la manière dont l’Etat nous accompagne qui pose question. La manière à laquelle nous sommes traités, regardés…est-ce-que l’on aurait accepté cela sur un autre territoire de la République ? C’est malheureusement l’instabilité politique nationale qui traduit ce manque de bienveillance. »

Mettre fin à l’assistanat et à l’argent gratuit

Pour conclure les discussions, la présidente a insisté avec fermeté, sur l’urgence de responsabiliser les populations et de mettre fin à l’argent gratuit : « On a fait plein de choses au niveau social, mais la réalité c’est qu’on a distribué le poisson sans apprendre aux gens à pêcher. L’argent gratuit a déresponsabilisé une partie de la population. Dépendre de l’argent de la collectivité ne peut être un mode de vie. Cela nous a explosé à la figure et cela ne peut continuer. L’argent gratuit, c’est terminé, parce que cela a échoué. »

De même, Philippe Blaise, premier vice-président, a appelé « les forces politiques à renoncer à la violence et à l’instabilité pour se battre pour le bien-être collectif » : « La lutte, ce n’est pas de détruire et de brûler les entreprises sous prétexte de récupérer les richesses et les emplois. C’est faux ! Il faut tirer les leçons du 13 mai : la lutte se retourne contre ceux qui la porte. Il faut ramener de la responsabilité dans les discours politiques indépendantistes pour ne pas trahir l’avenir de la jeunesse dans la violence et la destruction. »

Le budget 2025 a été voté à l’unanimité, avec les voix des Loyalistes et du Rassemblement et l’abstention des autres groupes.

Budget primitif 2025 : chiffres clés
Le budget s’élève à 51, 1 milliards de francs CFP dont 12 milliards en investissement et 39,1 milliards XPF en fonctionnement.
Il observe une baisse de 10 % par rapport à 2024, avec un déficit de -29 % de recettes soit -16,35 milliards de francs CFP.
8,99 milliards de francs en investissements :
5 programmes prioritaires participent à la relance économique :
1. Reconstruction et d’aménagement des bâtiments (2,22 milliards) ;
2. Réseau routier (1,58 milliard) ;
3. Collèges publics (1,24 milliard) ;
4. Equipement communal (997 millions) ;
5. Politiques sociales (617,7 millions).
13,77 milliards de francs en interventions et subventions
65 % des crédits dédiés à l’enseignement, la santé et la protection sociale :
1. Aide médicale : 4,12 milliards ;
2. Enseignement : 2,4 milliards (dont 676 millions au titre des allocations d’enseignement et 482 millions pour l’enseignement privé) ;
3. Santé publique et les actions médico-sociales : 2,4 milliards

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