Face au fléau de l’alcool, la province Sud lance une convention citoyenne



Sonia Backès, la présidente de l’assemblée de la province Sud et le Haut-commissaire de la République Louis Le Franc ont annoncé ce vendredi matin en conférence de presse le lancement d’une convention citoyenne sur la place de l’alcool en Nouvelle-Calédonie. Malgré les mesures mises en place précédemment par la province Sud et les autres collectivités, les chiffres restent explosifs : 80 % des infractions sont commises sous l’emprise de l’alcool, 73 % des accidents mortels sont dus à l’alcool. Face à ce constat dramatique, Sonia Backès a sollicité l’aide de l’État pour organiser à l’échelle de la Nouvelle-Calédonie cette convention citoyenne qui invite les citoyens à s’engager dans une réflexion commune pour trouver des pistes d’actions et tenter de régler ce problème de société.


Le fléau de l’alcool en Nouvelle-Calédonie ne date pas d’hier, il est profondément enraciné dans la société. Les chiffres parlent d’eux-mêmes a rappelé Sonia Backès, ce vendredi 6 octobre : « 80 % des infractions sont commises sous l’emprise de l’alcool, 90 % des suspensions de permis de conduire sont dus à l’alcool et 6 000 cas d’ivresses publiques manifestes ont été enregistrés à Nouméa. On a des chiffres qui sont explosifs par rapport au reste du territoire national. »

Le deuxième constat est que malgré les mesures instaurées par le code provincial des débits de boissons, telles la mise en place des bottles shops et l’obligation de présenter sa pièce d’identité lors de l’acte l’achat d’alcool, le problème n’a pas été résolu. Pas plus que l’augmentation du prix de l’alcool adoptée sous la mandature précédente… « Les collectivités ont chacune séparément travaillé pour essayer de trouver des solutions. »
Ces mesures ont certes limité le marché noir mais le problème s’est décalé ailleurs avec notamment l’augmentation de vols de bouteilles d’alcool lors des cambriolages.

« 1 330 opérations de contrôles effectuées par les policiers, une augmentation de 17 % par rapport à l’année précédente. 256 infractions liées à l’alcool, soit une hausse de 25 % », a précisé Louis Le Franc, Haut-commissaire de la République.

Même la répression exercée par l’État semble impuissante et cette problématique de l’alcool continue de gangréner la Nouvelle-Calédonie. « La répression a des vertus préventives et pédagogiques, quand quelqu’un est sanctionné, ce qu’on espère est qu’il retienne la leçon. On multiplie toutes les opérations de contrôle un peu partout en Nouvelle-Calédonie », a indiqué Louis Le Franc, le Haut-commissaire de la République. Cependant, force est de constater que depuis le début de l’année, il y a déjà 43 morts sur les routes de Nouvelle-Calédonie dont une grande partie doit être imputée à la consommation d’alcool.

Sonia Backès évoque un « problème sociétal » : « On a un lien à l’alcool en Nouvelle-Calédonie qui est particulier. Cette relation a pour conséquence de générer d’autres problématiques qu’on gère par ailleurs telles que les violences intrafamiliales, la délinquance et l’insécurité routière. »

Solliciter l’implication des citoyens calédoniens

Aussi, l’organisation de la convention citoyenne sur la place de l’alcool en Nouvelle-Calédonie telle que la projette Sonia Backès vise à donner la parole aux habitants, selon une méthode d’écoute active, en favorisant le débat au sein de la société civile et les corps intermédiaires afin de permettre les échanges, en vue d’enrichir le débat et influencer les décisions et actions des pouvoirs publics. « L’objectif est de faire participer les citoyens, un peu à l’instar de ce qu’on fait avec le budget participatif. La collectivité n’a pas le monopole des bonnes idées et là où l’on n’a pas été en capacité de régler le problème, peut-être que les citoyens ont des idées et des propositions à faire. »
Dans cette démarche, l’État est partie prenante en étant garant de la convention et fait partie du comité de gouvernance et en agissant sur des propositions qui concernent son champ de compétence.
« Je suis très heureux d’être aux côtés de la présidente de la province Sud qui a pris cette initiative d’organiser cette convention citoyenne, et en ce qui concerne l’État que je représente, je dois dire que c’est une très heureuse initiative », a réagi Louis Le Franc.

La province Sud veut impliquer tous les acteurs institutionnels, associatifs, experts en santé publique et en addictions et professionnels des débits de boissons car c’est un sujet qui concerne toute la population. « Nous avons l’État qui nous accompagne, les autorités religieuses qui ont déjà répondu à notre sollicitation, l’association française des maires qui participe à cette convention. Je souhaite évidemment solliciter le sénat coutumier, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et les autres provinces, ainsi que les communes parce que ça concerne tout le monde. Et que chacun puisse s’approprier ces propositions pour essayer de changer le lien qu’ont les Calédoniens avec l’alcool. »

Ainsi, les thèmes qui pourront être abordés lors de la convention sous forme de consultation en ligne, de tables rondes, de présentations d’experts et de groupes de travail porteront notamment sur : la tendance de la consommation d’alcool en Nouvelle-Calédonie, les impacts de la consommation d’alcool, les politiques de régulation de l’alcool et les expériences sur le terrain.

 

Appel aux citoyens engagés

La province Sud lance un appel aux citoyens engagés qui pourront candidater sur le site de la province Sud : https://www.province-sud.nc/form/convention-citoyenne pour représenter la voix de la population. Ces candidats seront tirés au sort afin de garantir la représentativité de la population parmi les habitants membres du comité de gouvernance. Ils pourront candidater jusqu’au 27 octobre 2023 à 16 h. Le tirage au sort aura lieu fin octobre.

 

Calendrier de travail partagé pour faire bouger les lignes sur l’alcool

  • Jusqu’au 27 octobre 2023 : lancement de l’appel aux citoyens engagés sur le site de la province Sud : https://www.province-sud.nc/form/convention-citoyenne
  • Fin octobre : organisation du tirage au sort des citoyens qui composeront la convention en veillant à la représentativité
  • Novembre : 4 réunions du comité et audition d’experts
  • Décembre : lancement de la consultation en ligne

2024 :

  • Janvier : analyse de la consultation
  • Février : réunion en présentiel et participation des directions provinciales et experts pour alimenter les travaux des citoyens – Rédaction de l’avis citoyen
  • Mars : transmission de l’avis au groupe d’expert juridique chargé de définir pour chacune des propositions la compétence afférente (État, Nouvelle-Calédonie, Provinces, communes) et la formulation adaptée
  • Avril : restitution de l’avis citoyen
  • Juillet et octobre : comité de suivi de mise en œuvre des évolutions attendues.

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