La province Sud organise régulièrement des « ateliers de la transition économique et écologique ». Celui de vendredi dernier était consacré à la déconstruction et au traitement des déchets issus de navires hors d’usage. L’occasion pour les acteurs de la filière de faire le point sur sa structuration, de proposer des actions de prévention et de réfléchir à son financement.
« Des propositions concrètes ». C’est ce qui était attendu, comme l’a annoncé Françoise Suve en introduction, de ce premier atelier de la transition économique et écologique consacré à la prévention des déchets de navires hors d’usage (NHU). Alors que la filière est en préparation depuis 2019, son avancée se précise : s’adressant à l’ensemble des acteurs présents vendredi matin, l’élue a précisé « Nous avons, grâce à l’opération-pilote de début d’année, pu caractériser tous les éléments d’un démantèlement (gisement, manière d’opérer, coût…). Nous souhaitons donc avancer vite, mais nous avons besoin de vous, pour échanger, entendre vos propositions et ne rien oublier, afin que nous puissions bientôt porter le projet de réglementation de la filière ».
6 000 bateaux en fin de vie
La matinée, studieuse, s’est organisée en 2 temps. Un premier passage a permis de faire le point sur l’état des lieux actuel : contexte, réglementation, retour d’expérience du chantier-test de démantèlement et benchmark. « Conséquence du boom des navires de plaisance il y a 30 ans, nous nous retrouvons avec de nombreux bateaux qui seront en fin de vie dans les 15 ans à venir », explique la Direction provinciale du développement durable des territoires (DDDT). « Le constat est clair : il y a des pratiques déviantes qui consistent à abandonner les navires et leur déconstruction n’est réalisée que lorsqu’ils représentent un risque urgent de pollution ou de circulation. » D’après l’étude diagnostique initiée par le Cluster maritime en 2018, il y aurait plus de 6 000 bateaux en fin de vie et 48 épaves. Pour prendre en charge ces bateaux, « la structuration de la filière s’organise autour de 4 points : l’audit-devis, le renflouement et grutage, la déconstruction et la gestion administrative », explique le cluster, avant de développer sur la dépollution, les filières de traitement des différents matériaux, et les modalités de financement envisageables. La Direction provinciale de l’aménagement de l’équipement et des moyens et les Affaires maritimes ont ensuite évoqué la réglementation, les procédures et les poursuites liées à l’occupation du domaine public maritime par des navires hors d’usage. Puis, pour apporter un éclairage concret au projet de filière, l’entreprise Royal Recy Boat, opératrice du chantier-test de démantèlement de 16 épaves commandé par la province Sud, a partagé son retour d’expérience : elle a engagé 4 temps pleins et mis à contribution 5 entreprises locales ! L’opération a aussi permis de connaître plus précisément les quantités de matériaux récupérés, la durée d’intervention nécessaire et surtout les freins et les optimisations à envisager.
Quelles solutions pour prévenir les déchets et financer leur traitement ?
Cette problématique de gestion des NHU se retrouve partout sur le globe et la convention de Hong-Kong comme le Boat Digest européen visent à en améliorer les pratiques. À son échelle, la France a décidé de mettre en place un financement de la filière via une REP (Responsabilité élargie du producteur) : les metteurs sur le marché reversent l’éco-contribution (collectée à l’achat) à un éco-organisme, qui va prendre en charge la déconstruction des bateaux concernés et la valorisation des déchets. Le financement de cette filière de gestion est complété par le reversement d’un pourcentage de la taxe annuelle sur les engins maritimes à usage personnel (ancienne DAFN).
Forts de toutes ces informations et exemples, les participants se sont alors divisés eu deux ateliers d’intelligence collective pour réfléchir aux moyens de prévenir ces déchets et au financement de la filière. « De nombreuses idées très intéressantes sont ressorties de ce temps fort », comme l’a souligné Françoise Suve lors de la restitution. Pour réduire le nombre de NHU, le 1er groupe a notamment proposé d’identifier des zones d’implantation de nouveaux corps-morts afin d’éviter les échouages et abandons, de mettre en place une assurance de responsabilité civile obligatoire et un contrôle technique des bateaux et des corps-morts, de sensibiliser les usagers aux conditions de navigation (météo et reliefs) ou de coordonner les différentes réglementations… Le 2nd groupe a travaillé sur la définition d’un fonds de financement idéal pour les navires de moins de 20 m, dédié à la déconstruction – réalisée par un éco-organisme – et qui s’appuierait sur 4 ou 5 sources de financement. « Autant de propositions qui viennent compléter nos travaux, s’est réjouie Françoise Suve, en conclusion de la matinée. Au-delà de la REP, d’autres points sont effectivement importants à soulever, comme la nécessité d’une assurance obligatoire des navires ou d’un contrôle renforcé. Notre objectif, avec la DDDT, dans les mois à venir, sera de préparer un projet de réglementation. La province Sud peut être un véritable levier pour lancer les premières actions-tests et porter le projet de réglementation mais elle a besoin de la coopération de tous les acteurs pour mettre en place cette filière. »
Les ateliers de la transition économique et écologique sont menés dans le cadre du schéma provincial de prévention et de gestion des déchets.
En savoir plus
- Sur le chantier-pilote de démantèlement
https://www.sudmag.nc/2022/04/12/gestion-de-dechets-on-peut-recuperer-jusqua-90-des-epaves/
- Sur les ateliers de la transition économique et écologique
https://www.province-sud.nc/element-thematique/ateliers#page-content