Jean-Claude Tardy, éminent virologue lyonnais, étudie depuis 40 ans les virus responsables du sida et des hépatites. Invité par la province Sud à former les agents de la DPASS aux TROD, Tests Rapides d’Orientation Diagnostic, le biologiste nous explique l’importance de se faire dépister, pour soi, et pour les autres. Une première en Nouvelle-Calédonie.
Jean-Claude Tardy, vous êtes pharmacien biologiste et praticien hospitalier au laboratoire de virologie de Lyon. Pourquoi avez-vous été invité par la province Sud ?
On m’a demandé de venir pour une expérimentation particulièrement intéressante. Il s’agit de la mise en place des TROD, Tests Rapides d’Orientation diagnostic. Ces TROD concernent trois virus : le VIH (Virus immunodéficience humaine) responsable du sida, le virus de l’hépatite B (VHB) et celui de l’hépatite C (VHC). Ces virus causent des maladies extrêmement fréquentes et graves. Et pour chacun de ces 3 virus, il existe des épidémies cachées. Beaucoup de personnes sont infectées mais ne le savent pas car elles ne sont pas rentrées dans un processus de soins et n’ont jamais été dans un laboratoire d’analyse ou même à l’hôpital. Grâce à ces tests rapides, en quelques minutes, à l’aide d’un prélèvement de sang papillaire (au bout du doigt), on peut déjà avoir un diagnostic d’orientation. Ce résultat, il va falloir ensuite le confirmer par une réaction en laboratoire.
Concrètement, vous êtes venu expliquer aux agents de la Direction provinciale de l’action sanitaire et sociale (DPASS) la façon de procéder ?
Ma mission consiste surtout à informer les professionnels et à leur transmettre les connaissances nécessaires sur ces virus et sur les maladies qu’ils provoquent. De façon à ce qu’ils soient préparés pour réaliser ces tests sur les patients. C’est aussi une obligation législative qui stipule que les professionnels médicaux doivent recevoir une formation théorique et pratique aux TROD. C’est juste une petite piqûre au bout du doigt mais il y a des bonnes pratiques à respecter que l’on soit médecin, infirmière ou sage-femme.
Pour la Nouvelle-Calédonie, c’était important de développer ces tests ici ?
C’est important que les TRODS soient développés partout dans le monde. Et la Nouvelle-Calédonie n’y échappe pas, même si elle peut être à part sur un certain nombre de points. Cette pratique est inscrite au journal officiel de la République française depuis mai 2010 pour le VIH, depuis 2016 pour l’hépatite B et bientôt pour l’hépatite C.
En France métropolitaine, combien de personnes sont atteintes par ces maladies ?
Environ 150 000 personnes sont atteintes du VIH. Cependant on estime qu’il y a 5 000 Français infectés par le VIH mais ne le savent pas. Pour l’hépatite C, le nombre de personnes contaminées s’élèverait à 74 000.
Il existe des médicaments et des antiviraux extrêmement efficaces qui empêchent les personnes infectées de tomber malade. Le virus de l’hépatite C est quant à lui, complétement éradiqué en deux mois grâce au traitement.
Pour celles atteintes du VIH et du VHB qui ne peuvent pas encore être complétement guéries, on peut les placer en viro-suppression. C’est-à-dire que le virus est toujours là mais les personnes infectées ne contaminent plus les autres. Le message à retenir c’est : se protéger pour mieux protéger les autres.